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Les sept Eglises Imprimer
Auteur : Jean Ferrand
Sujet : Les sept Eglises
Date : 2010-03-23 11:44:37

2. Les grandes énigmes de l'Apocalypse.

15. Les sept Eglises.

Les lettres aux sept Eglises d’Asie : Ephèse, Smyrne, Pergame, Thyatire, Sardes, Philadelphie et Laodicée, ouvrent l’Apocalypse. C’est le premier des sept cycles.

Jean nomme « les sept Eglises qui sont en Asie » (Ap 1,4). L’article défini, avoue Prigent (page 87), est gênant. En effet sous Domitien, où il place la composition de l’Apocalypse, il existait bien plus de sept Eglises dans l’Asie proconsulaire. Pourquoi Jean aurait-il alors fait un tri ? Pour aboutir au nombre « mythique » de sept ? Mais alors pourquoi « les » Eglises ?

Jean donne bien l’impression d’écrire à un groupe homogène, familièrement connu de lui, et placé sous sa responsabilité immédiate.

Mais pourquoi ces sept Eglises-là, et non d’autres ? Prigent élabore une théorie fragile pour justifier ce choix. « Sans doute n’y a-t-il qu’une hérésie dont le message trouble profondément les Eglises d’Asie Mineure. Ou plus exactement certaines d’entre elles : les sept auxquelles l’auteur de l’Apocalypse adresse ses lettres. » (L’Apocalypse, 1998, page 33). Et quelle est cette unique hérésie, à laquelle Jean voudrait remédier ? Le nicolaïsme, qui était selon Prigent, une gnose dualiste, autorisant de sacrifier aux idoles.

Si Jean envoyait son livre aux sept Eglises pour réfuter le nicolaïsme, on ne voit pas pourquoi il ne parlerait plus de cette doctrine dans le corps de l’ouvrage.

Que seulement sept Eglises sur un plus grand nombre, à la fin du premier siècle, fussent contaminées par une hérésie aussi grave, cela paraît bien peu vraisemblable. Elle devait être répandue partout.

En premier lieu, il n’est pas du tout certain, d’après la teneur des sept lettres, que les sept Eglises d’Asie souffrissent toutes d’un même mal. Procédons à une rapide enquête pour le vérifier.

L’Eglise d’Ephèse hait les Nicolaïtes. Elle n’est pas tombée dans cette hérésie. Mais elle a seulement abandonné un peu son premier amour.

L’Eglise de Smyrne a des problèmes avec le judaïsme. Il n’est pas du tout certain que « cette synagogue de Satan » dont on nous parle (Ap 2,9) fût nicolaïte. Les dits Nicolaïtes, hérétiques chrétiens, se donnaient comme chrétiens, et non pas comme juifs. « Ceux qui usurpent le titre de Juifs » (idem) sont donc des Juifs. Mais comme le note avec raison la Bible de Jérusalem : «C’est l’Eglise du Christ qui est désormais le véritable Israël », contre les prétentions même des Juifs.

L’Eglise de Pergame habite près du « trône de Satan. » (Ap 2,13). Quelques fidèles tiennent aussi à la doctrine de « Balaam », qui est celle des Nicolaïtes. « Ils mangent des viandes immolées aux idoles et se prostituent. » (Ap 2,14).

L’Eglise de Thyatire tolère « Jézabel, cette femme qui se dit prophétesse et égare mes serviteurs, leur enseignant à se prostituer et à manger des viandes sacrifiées aux idoles.» (Ap 2,20). Admettons qu’elle fût aussi nicolaïte.

A l’Eglise de Sardes : « Non, je n’ai pas trouvé ta vie bien pleine aux yeux de mon Dieu.» (Ap 3,2). Sans autre précision.

L’Eglise de Philadelphie est également éprouvée par « des gens de la synagogue de Satan.» (Ap 3,9). Pas du tout sûr, là encore, qu’ils fussent des Nicolaïtes.

Enfin l’Eglise de Laodicée entend ce reproche : « Tu n’es ni froid ni bouillant. Que n’es-tu froid ou bouillant ! » (Ap 3,15).

Il est évident que Jean lutte sur de multiples fronts à la fois, et sur de multiples problèmes, tant internes qu’externes. Toute Eglise connaît un jour ou l’autre des épreuves de ce genre.

Nous savons que l’hérésie gnostique, au premier siècle, fut multiforme. Il y eut Nicolas, ou ceux qui se réclamaient de son nom. Mais il y eut aussi Cérinthe en Asie, et Simon le magicien.

Dans ces conditions le choix des sept Eglises par Jean, à la fin du premier siècle, paraît fort arbitraire. Il serait bien plus logique d’admettre que Jean écrivait non pas à la fin du premier siècle, ou même au début du second comme le pensent certains, mais bien plutôt vers le milieu du premier, en plein cœur de la persécution de Néron. Dans notre système, les sept Eglises apparaîtraient alors comme un groupe fort homogène, et méritant ainsi l’article défini : les Eglises de la province d’Asie, alors instituées, et placées sous la responsabilité directe de l’apôtre Jean, lui-même résidant habituellement à Ephèse comme la tradition ancienne le rapporte, mais temporairement exilé à Pathmos pour cause de persécution (cf. Ap 1,9).

Il est vrai qu’on connaît encore au moins deux Eglises, nommées dans le Nouveau Testament, érigées dès cette haute époque en Asie mineure : Colosses et Hiérapolis. Mais on remarque sur la carte que ces deux villes étaient fort proches de Laodicée, qui occupait même une position centrale par rapport à elles. Sans doute Laodicée aura-t-elle été choisie comme figurative de cet ensemble, et chargée de transmettre aux autres le message de l’Apocalypse. Peut-être l’ange, ou responsable, ou évêque, de ces trois bourgades, auquel s’adresse Jean, demeurait-il à Laodicée. Il est vrai que les sept Eglises nommées par Jean ont été élues comme représentatives, ou symboliques, des Eglises du monde entier, et chargées de leur transmettre de proche en proche la parole de la prophétie. Mais pourquoi sept seulement ? En vertu du chandelier à sept branches du Temple de Jérusalem. Car sept flambeaux, avec sept étoiles ou flammes, brillent dans le sanctuaire éternel de Dieu (cf. Ap 1,20), comme il en était déjà dans le sanctuaire de pierres, à titre de symbole ou de prophétie (cf. Ex 25,31-39). A chacun de ces flambeaux préside un ange.

« Jean aux sept Eglises, celles d’Asie. » (Ap 1,4). « Quant au mystère des sept étoiles que tu as vues dans ma main droite et des sept luminaires d’or, le voici : les sept étoiles sont les Anges des sept Eglises ; et les sept luminaires sont les sept Eglises. » (Ap 1,20). Sept luminaires, et sept lumières, mais un seul chandelier (puisque Jésus le tient dans une seule main). Sept Eglises particulières, représentatives de toutes les Eglises particulières, mais une seule Eglise universelle. On observe dès l’abord cet emboîtement des plans, le plan physique, le plan spirituel voire même le plan incréé, une poupée gigogne mystique en quelque sorte, qui sera constant dans tout le reste de l’Apocalypse : ce chandelier, c’est aussi l’Eglise ; mais l’Eglise à son tour, c’est le corps mystique du Christ.

Car l’ange représente aussi bien l’évêque. Sans doute, dans toute l’Apocalypse, les anges sont réellement des anges, puisqu’ils contemplent sans cesse, et depuis l’aube des temps, la face de Dieu, qu’ils officient dans son temple éternel et sont envoyés en mission par toute la terre en tant que messagers de Dieu.

Les anges des sept Eglises n’échappent pas à cette problématique. On pourrait dans un premier temps les assimiler aux sept anges de la face (cf. déjà Ap 1,4 : « les sept Esprits présents devant son trône »), connus de l’Ancien Testament (cf. Tb 12,15 : « Je suis Raphaël, l’un des sept Anges, qui se tiennent toujours prêts à pénétrer auprès de la Gloire du Seigneur.») Cependant, ils sont aussi à n’en pas douter des responsables d’Eglises, voire des évêques. En effet Jésus, le « Fils d’homme » d’Ap 1,19, leur reproche d’emblée les péchés des Eglises, auxquelles ils président, comme s’ils avaient commis des négligences de gouvernement. Or les anges de Dieu, tout le monde le sait, ne peuvent pas pécher puisque, précisément, ils voient la face de Dieu. Ces lumignons sont donc des anges, mais ils sont aussi des évêques, mais ils sont aussi des communautés. La poupée gigogne continue. C’est bien à des adresses précises, sur cette terre, que Jean expédie ses sept missives. Et les porteurs sauront les faire parvenir à leurs destinataires respectifs. Mais ces Eglises, physiquement constituées sur le sol de l’Asie, siègent déjà de manière mystique dans les cieux.

De la même manière, Jean s’exprimera dans sa deuxième épître : « Moi, le presbytre, à la Dame élue [qui trône déjà dans le ciel] et à ses enfants [qui résident encore sur la terre]. » (2 Jn 1).


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