Ma comparaison entre la crise actuelle de la FSSPX et la scission FN-MNR mérite d'être complétée. Autre point de convergence entre les deux conflits: les jeunes sont massivement du côté de la dissidence. Début 1999 il ne restait quasiment plus personne au FNJ, la quasi-totalité des jeunes ayant suivi Mégret (en partie d'ailleurs par rejet de Samuel Maréchal, gendre de JMLP, qui cristallisait sur sa personne des haines hélas pas totalement infondées). De la même manière, la grande majorité des jeunes se réclamant de l'héritage de Mgr Lefebvre semblent avoir des sympathies laguéristes prononcées, comme tendrait à le prouver le FC où la majorité des intervenants (jeunes pour la plupart) sont laguéristes. Mais je peux certifier d'après mes contacts et informations que c'est vrai également à Saint-Nicolas, évidemment à Bordeaux mais aussi ailleurs. Seule exception notable: les jeunes du MJCF très disciplinés et hiérarchisés, mais très minoritaires si l'on compte l'ensemble des jeunes lefebvristes.
Deuxième point de convergence: l'attitude des intellectuels et des universitaires. A l'époque ils avaient presque tous pris partie pour Mégret le polytechnicien, le professionnel contre Le Pen le fils du peuple, l'artiste. Là encore la plupart des têtes pensantes proches du combat de la FSSPX ne cèlent pas leur sympathie pour l'abbé Laguérie. Beaucoup d'ex-professeurs et intervenants de l'Institut universitaire Saint-Pie X ont pris fait et cause pour les prêtres de Bordeaux à l'instar du géopoliticien Aymeric Chauprade. Il semble que l'abbé Laguérie ait surtout le soutien des jeunes et des intellectuels. La maison généralice peut compter sur une majorité de personnes âgées, par nature conservatrices et légitimistes (c'est ce qui a sauvé Le Pen contre Mégret et à mon sens c'est ce qui sauvera Chirac face à Sarkozy en avril 2007) et sur une majorité de personnes non ou peu diplômées. Ce qui encore une fois n'est pas un jugement de valeur: on peut très bien ne pas avoir fait d'études et avoir plus de bon sens qu'un docteur ès lettres. Qu'on ne me fasse donc pas dire ce que je n'ai pas écrit.
Voilà, je crois, quelques remarques que j'ai la faiblesse de trouver intéressantes et amusantes mais qui apparemment ne semblent pas faire recette si j'en juge par les réactions suscitées par mes précédentes analyses.
Dernier point: comme j'ai souvent été sévère (mais c'était aussi pour alimenter le débat et la polémique, j'ai horreur du Politiquement Correct) avec la FSSPX, je voudrais quand même accorder un bon point à Mgr Williamson qui me semble (et là je ne plaisante pas, je ne suis pas ironique) avoir été la seule personnalité dans cette crise à avoir été exemplaire et à avoir joué un rôle éminemment positif. Le protocole d'accord qu'il avait écrit était intelligent, pondéré et équilibré et permettait aux deux parties de sauver la face. Hormis quelques réserves sur le canot de sauvetage, j'ai trouvé ses deux homélies remarquables, leur hauteur de vue et leur originalité ne pouvant que susciter la sympathie.
J'ai déjà dit combien le rapprochement, au moins momentané, entre l'abbé Laguérie et Mgr Williamson, était à première vue surprenant. Le premier n'attache guère d'importance à la tenue vestimentaire, le second a écrit pour seule oeuvre pontificale un opuscule Féminisme et pantalon où il fait part de positions réactionnaires (mais que pour ma part je trouve courageuses et parfaitement justifiées, n'en déplaise aux mondaines). Les abbés Laguérie, Héry et de Tanoüarn sont très rationalistes, Mgr Williamson est volontiers apparitionniste (on dit qu'il a été converti par les apparitions de la Vierge à Garabandal)et enclin à prêcher sur la fin du monde. Les abbés Laguérie, Héry et de Tanoüarn sont d'un naturel optimiste et se veulent rassurants, Mgr Williamson est porté sur un certain catastrophisme dans beaucoup de ses interventions.
Mais il y a un point qui réunit tous ces clercs, et c'est ce qui explique leur rapprochement d'aujourd'hui: ils sont humains, profondément humains. Les approcher est un délice. Peut-on en dire autant de véritables glaçons comme Mgr Fellay ou l'abbé de Cacqueray? Ce n'est d'ailleurs pas forcément de leur faute s'ils sont si froids, si ternes et si médiocres, on ne choisit pas sa personnalité, on est le produit d'un milieu, d'une éducation. Quoi de plus complexe que le caractère? J'avoue que le seul des quatre évêques à qui j'ai pu parler longuement à la sortie d'une messe de confirmation à Genève, c'est Mgr Williamson qui est très chaleureux, affable, abordable, humain. Je ne crois pas qu'il faille chercher très loin pour expliquer la crise: notre ami l'avocat Jean-Paul a raison, c'est d'abord et avant tout une différence de mentalité, de personnalité, de caractère, de tempérament, de vision de la vie et du sacerdoce. Il ne suffit pas d'aimer et de respecter Mgr Lefebvre pour s'entendre durablement et être d'accord sur tout.
Car s'il fallait expliquer la crise comme le font certains esprits qui voient des complots partout (le complot existe certes, mais il n'est pas là où ils le disent) par la gnose, comment expliquer que Mgr Willianson, enfant chéri de Sous la bannière d'Adrien Loubier et aimé des dominicains d'Avrillé qui défendent les deux des positions antignostiques radicales (avec certes des nuances dans lesquelles je n'entrerai pas aujourd'hui de peur de lasser les liseurs du FC), comment expliquer, dis-je, que Mgr Williamson se retrouve en compagnie d'un Héry et d'un Tanoüarn qui n'ont pas eu de mots assez durs contre l'oeuvre d'Etienne Couvert et la revue d'Adrien Loubier?
Les choses dans la vie sont souvent plus simples qu'on ne le pense et l'on veut voir de grandes querelles d'idées là où pourtant priment les querelles d'hommes. Car comme dit l'adage là où il y a de l'homme, il y a de l'hommerie.
Petrus.
PS: J'espère que ce message suscitera plus de réactions. J'ai donné le meilleur de moi-même et honnêtement je ne sais pas mieux faire. Les gens insatisfaits, je ne peux pas leur donner mieux, désormais ni les rembourser. C'est tout pour ce soir. Demain nous continuerons à analyser la crise de la FSSPX. Je suis intarissable. Merci les abbés, grâce à vous je ne chôme pas. Et je m'amuse, je m'amuse, si vous saviez. Un vrai bonheur.
Petrus.