Les archives du Forum Catholique
Forum | Documents | Liens | Q.F.P. | Oremus

Les archives du Forum Catholique

JUIN 2001 A JUILLET 2003

Retour à la liste des messages | Rechercher

Afficher le fil complet

Les francs-maçons : «Pas de loi sur le voile à l'école !» Imprimer
Auteur : Jean KINZLER
Sujet : Les francs-maçons : «Pas de loi sur le voile à l'école !»
Date : 2003-06-19 18:06:18

Les francs-maçons : «as de loi sur le voile à l'école !»

Propos recueillis par Alexis Brézet et Patrice Burnat-le figaro-
[19 juin 2003]



Régression religieuse: êtes-vous tous d'accord avec cette analyse?
Jean MURAT. – Je crois qu'il faut distinguer les confessions du sacré ou de la religion. Autant je partage totalement le sentiment d'Alain Bauer pour ce qui est des confessions, autant je considère que le sacré est une nécessité philosophique. La spiritualité ne saurait être une régression.
Alain BAUER. – Le fond du problème, ce n'est pas la foi, c'est l'élimination de la foi des autres. La régression identitaire conduit à la violence. On peut considérer qu'il appartient à l'État de réguler les communautés religieuses de manière à ce qu'elles cohabitent, mais ce n'est pas le modèle républicain tel que la maçonnerie le conçoit. Pour nous, la République doit ignorer les communautés et ne s'intéresser qu'aux individus qui les composent. Ce fut la grande erreur de la gauche du début des années quatre-vingt que de l'oublier.
Marie-France PICART. – Le communautarisme nous interpelle, car il touche l'identité de la femme. C'est parce que nous considérons la laïcité comme un espace des libertés que nous croyons qu'aucun signe distinctif ne doit apparaître à l'école. Comme en loge.

Pensez-vous qu'il faille une loi pour interdire le voile à l'école?
Sylvia GRAZ. – Nous n'avons jamais dit cela. Une loi existe. Il faut l'appliquer.
Alain BAUER. – Le pire serait de créer une loi contre le voile. Nous sommes tous d'accord sur ce point.
Michel BARAT. – Si une loi était mise en place sur le voile, ce serait une intrusion du pouvoir civil dans la vie religieuse.

Mais si la loi est applicable, pourquoi le Conseil d'État a-t-il rendu sur le voile une décision si ambiguë?
Alain BAUER. – Le Conseil d'État n'a rendu aucune décision: il s'est contenté de donner un avis qui est en réalité une non-solution, car personne n'avait le courage d'assumer un choix clair. En revanche, depuis 1905, le Conseil a rendu des dizaines d'arrêts sur l'habillement dans les écoles, l'enseignement religieux, la présence de crucifix... Cette jurisprudence existe; elle est parfaitement claire. Il suffit de la mettre en œuvre.

Ne faut-il pas, à tout le moins, une modification législative pour financer la construction de mosquées indépendantes des puissances étrangères?
Michel BARAT. – Pas plus que pour le voile! La loi de 1901, qui concerne les associations culturelles, et la loi de 1905, pour les associations cultuelles, permettent parfaitement de percevoir des subventions publiques dans le cadre d'un exercice de construction.
Alain BAUER. – La loi de 1905 a été créée pour être souple. En 1921, pour la construction de la mosquée de Paris, un appel à la souscription nationale a été lancé, qui a permis à un certain nombre de collectivités souhaitant rendre hommage aux morts musulmans de la Première Guerre mondiale de financer la construction de cet édifice. Ce projet a été présenté par Édouard Herriot et adopté quasiment à l'unanimité par l'Assemblée nationale. Le système a fait la preuve de son adaptabilité. Pourquoi voudrait-on le changer?

La tentative d'organisation du culte musulman par le ministère de l'Intérieur vous choque-t-elle?
Alain BAUER. – Pas du tout. Dans ce pays, c'est l'État qui garantit le régime de tous les cultes, ils n'en sont pas, pour le moins, indépendants. Ce qui est étonnant, c'est que l'islam soit resté si longtemps sans représentation. Reste à régler un certain nombre de problèmes, dont celui de la formation des imams. C'est possible.

La future constitution européenne ne fera probablement pas référence à «l'héritage chrétien» de l'Europe, ni à aucune religion précise. Qu'en pensez-vous?
Michel BARAT. – Sur ces questions-là, il y a un véritable enjeu. Qu'il soit écrit que l'Europe a un passé chrétien ne me choquerait pas, mais ne dire que cela serait une absurdité. Le passé spirituel de l'Europe est tout autant musulman ou juif que chrétien. Et il y a aussi un autre passé, qui est un passé spirituel laïque...
Michel BAUER. – C'est ce que nous avons écrit au président Giscard d'Estaing. Les francs-maçons européens ne sont pas pour rien dans la dernière rédaction du texte. «Héritages culturels, religieux et humanistes»... voilà qui nous convient tout à fait. Au reste, je ne crois pas que cette affaire soit essentielle aux yeux de l'Église catholique. C'est un subterfuge pour agiter le taureau laïque. La vérité est que l'Église veut une légitimation politique, en France comme en Europe. Elle souhaite la création d'un conseil représentatif des Églises qui lui permettrait d'ouvrir un nouvel espace de dialogue et d'étendre à toute l'Europe une sorte de nouveau concordat. C'est l'idée, contestable, qui sous-tend les articles 36 et 37 de la future Constitution. On la retrouve dans les propositions de François Baroin sur la laïcité.

Marie-France PICART. – Les obédiences féminines européennes ont d'ailleurs demandé un changement du texte du projet de Constitution européenne. Elles y attachent beaucoup d'importance.

Où en êtes-vous, justement, de vos relations avec l'Église catholique?
Michel BARAT. – Nous défendons avec elle la loi de 1905. Mgr Lustiger, le président de la Fédération protestante de France et le grand maître du Grand Orient sont en plein accord sur ce sujet!
Jean MURAT. – Nous entretenons des contacts réguliers avec l'Église catholique, mais les incompréhensions demeurent. Certes L'Église, dans la réforme du droit canon de 1983, a supprimé l'excommunication des ordres maçonniques, mais la franc-maçonnerie continue d'être très officiellement réprouvée par le Vatican.
Michel BARAT. – Il ne faut pas se tromper sur la portée de cette «avancée». En vérité, les francs-maçons de France n'ont jamais été effectivement frappés d'excommunication, sauf peut-être à l'époque napoléonienne. Mais si, aujourd'hui, il n'y a plus d'excommunication, il reste la «juste peine», qui, selon le dogme catholique, peut priver le franc-maçon d'absolution et donc l'envoyer en enfer. Dans l'ancien droit canon, j'étais condamné en tant que groupe; aujourd'hui, je peux l'être en tant qu'individu. Je ne suis pas sûr que ce soit un progrès...
Jean MURAT. – J'ajouterai que l'Église refuse de faire une différence entre les obédiences croyant en Dieu et celles qui ne croient pas ou qui laissent la liberté de choix. Nous sommes mis dans le même sac.

La franc-maçonnerie n'a pas été épargnée par les «affaires». Où en êtes-vous de vos «opérations mains propres»?
Michel BARAT. – Vous aurez remarqué que, depuis quelques mois, on parle beaucoup moins de ces dérives. C'est le signe que la réaction énergique de la maçonnerie française a porté ses fruits.
Sylvia GRAZ. – Un des problèmes majeurs auxquels nous devions faire face était qu'un maçon exclu d'une obédience en raison de son comportement pouvait s'inscrire ailleurs. C'est fini: nous avons créé une sorte de casier judiciaire, accessible à toutes les obédiences reconnues, qui fait qu'un maçon exclu, par exemple, de la Grande Loge ou du Droit Humain ne peut plus aller nulle part, sauf à créer sa propre obédience.

Voilà qui nous amène à la question du secret: les francs-maçons y renonceront-ils un jour?
Alain BAUER. – Avez-vous posé la question à la CGT? Le comité de rédaction du Figaro est-il ouvert au public? Le secret n'est pas maçon, c'est une spécificité très française qui se nourrit, chez les francs-maçons, des souvenirs de l'Occupation. Dans les pays anglo-saxons, de tradition maçonnique, le fait d'être maçon est presque indiqué sur la carte de visite.
Je demande à nos frères d'avoir la fierté de leur appartenance, mais je ne publierai pas plus la liste des adhérents au Grand Orient que le Parti socialiste ou l'UMP ne publient celle de leurs militants.
Jean MURAT. – Nous demandons, quant à nous, aux responsables de la GLNF de s'afficher sans complexe. Mais je connais aussi des frères qui, dans leur profession privée, ne peuvent pas sincèrement se permettre d'affronter les pouvoirs locaux, politiques ou ecclésiaux. Pour eux, le secret est une nécessité.
Michel BARAT. – En France, une règle protège l'appartenance philosophique, religieuse ou politique. C'est un droit constitutionnel. Pourquoi seuls les francs-maçons n'auraient-ils pas ce droit?

Dans deux cent soixante-quinze ans, la maçonnerie sera-t-elle encore présente?
Sylvia GRAZ. – Dans deux cent soixante-quinze ans, les hommes et les femmes auront-ils cessé de s'interroger?




La discussion

      Les francs-maçons : «Pas de loi sur l [...], de Jean KINZLER [2003-06-19 18:06:18]
          La maçonnerie française se porte bie [...], de Jean KINZLER [2003-06-19 18:08:22]