Nuances
Lux -  2011-03-10 16:32:57

Nuances

Distinguer Benoît XVI, pape de l'Eglise catholique, apostolique et romaine, de M. Ratzinger, théologien catholique, est en l'espèce de la première importance. Il n'y a vraiment pas lieu de s'enthousiasmer comme vous le faites. Il y a lieu de réfléchir et d'argumenter - même si c'est difficile sur un forum dans lequel la majorité des interventions sont consacrées à l'immédiat, ou à la polémique (mais on ne peut pas faire autrement, car ce qui est plus facile gagne toujours contre ce qui est plus difficile - ou alors, il faudrait que XA proclame un règlement drastique... qui viderait son beau forum !). Concernant la laïcité, par exemple, Pie IX n'est pas fou quand il condamne l'idée que "l'Eglise doit être séparée de l'Etat, et l'Etat de l'Eglise" (proposition LV du Syllabus). Je n'arrive plus à retrouver l'allocution Acerbissimum, où tout est expliqué. Je crois qu'elle se trouve sur le site Salve Regina mais, depuis le changement, je n'arrive plus à rien trouver sur ce site. La laïcité est certes une invention chrétienne, mais la laïcité en tant qu'invention chrétienne n'a rien à voir (rien du tout) avec la laïcité telle qu'on l'entend aujourd'hui. Peut-être vaudrait-il mieux trouver un autre mot. Pour le magistère pré-conciliaire (aujourd'hui, on ne sait pas vraiment, comme en bien d'autre domaines), la laïcité consiste à distinguer ce qui est d'ordre temporel et ce qui est d'ordre spirituel. Le deuxième est néanmoins supérieur au premier, car il est ordonné directement au salut de l'homme, tandis que l'ordre temporel y est ordonné indirectement, à travers la poursuite du bien commun. Ce bien commun, c'est d'ailleurs à l'Eglise de le déterminer, manifestant la parole du Christ selon laquelle tout pouvoir vient de Dieu. Cette distinction n'a donc rien à voir avec la séparation des Eglises et de l'Etat. Il faudrait évidement développer, préciser, mais j'attends de voir si cela vous intéresse (ce que j'espère) ou si vous étiez juste dans l'idolâtrie d'un M. Ratzinger que nul n'aurait droit de critiquer, même Pie IX. Concernant les Juifs, c'est encore bien plus compliqué, comme je l'ai déjà relevé sur ce forum il y a quelques mois. Vous avez raison de distinguer la conversion globale des Juifs des conversions individuelles. Mais il y a incontestablement un changement chez les théologiens contemporains par rapport à la doctrine traditionnelle, manifesté par la modification totale de la prière du Vendredi-Saint. On peut tout à fait penser que la conversion globale des Juifs est souhaitable car elle signifie l'avènement de Notre-Seigneur, et qu'elle passe par des conversions individuelles (le texte de Saint-Paul aux Romains est très difficile à interpréter). En tous les cas, il est indéniable que la position de M. Ratzinger est ici floue et difficile à interpréter en tout cas connotée. Le cardinal Barbarin, à partir de telles théories, déduisait, lui, que les Juifs ne devaient jamais être convertis par les Chrétiens (à la rigueur, comme lui, ils pouvaient se convertir tout seul), ce qui est inadmissible. Vous voyez que personne ne sait plus quoi penser sur cette question, et qu'on peut en parler si l'on veut bien sortir du passionnel. A titre personnel, je pense que l'on gagne toujours à repartir de l'enseignement traditionnel pour réfléchir en faisant abstraction d'une certaine pensée moderniste qui a faussé le débat. Ce n'est en tout cas pas l'avis du pape actuel. Le reste du livre a l'air moins polémique, et très intéressant. J'ai hâte de le lire. Quant à La Vie, c'est un journal complètement moderniste. Il n'y a qu'à voir la haine de Jean-Pierre Denis contre tout ce qui peut ressembler à quelque chose de traditionnel. Les articles syncrétistes, indifférentistes sont permanents. J'ai en tête un article où le journaliste expliquait qu'il fallait que les Chrétiens s'approprient les méthodes de relaxation du bouddhisme (ma grand-mère y est abonnée !). Enfin, lisez un peu sérieusement cette revue, et vous verrez. Pour commenter sérieusement ce livre, il faut vraiment le lire et non se contenter de ces quelques commentaires peut-être orientés.