Le liseur était encore debout et contemplait la nuit paisible, tout était apaisé, la frénésie, l'hystérie du samedi avait fait place au calme du dimanche, les excités de la veille avaient rangé leur musique anglaise, on ne les entendait plus, ils s'étaient fait oublier... des vacances, songeait-il ! voilà ce qu'il aurait fallu, se détendre quelque part, peut-être un port, à une terrasse... le liseur est allé se servir un verre.

Certes les destinations se raréfiaient pour ceux qui prisaient la servilité bon marché d'un Orient très moyen, d'ailleurs le flux ne s'était-il pas inversé, on mentionnait aux actualités les camps saturés de Lampedusa tandis que les camps de vacances restaient vides dans ces pays où l'animation était pourtant assurée, une erreur d'interprétation des voyagistes sans doute, se disait-il, en versant le liquide couleur de crème à bronzer et qui en exhalait l'odeur équivoque, on rêvait de croisière sur un Nil obstat, de pyramides en ruines, d'oasis all inclusive, il lampa une gorgée qui le médusa.

Les retraités français de Marrakech avaient du souci à se faire, leur retraite dorée n'était pas si assurée, ma roque avec échec au Roi n'était plus improbable, on abandonnerait peut-être précipitamment sa belle villa... comme un air de déjà vu ! ceux qui étaient venus se reposer restant encore moins longtemps que ceux qui étaient venus travailler, la morale de l'histoire sans doute, il en fallait toujours une, ne serait-ce que par défaut, ainsi Sarkozy n'avait-il pas envoyé son double comme ambassadeur en Tunisie, cela n'avait pas fait rire les Tunisiens, on se demande bien pourquoi en France où l'on rit de tout, le liseur est allé se resservir un verre.