En vogue chez les Tradi, en provenance, si je ne m'abuse, du Pointet, brillamment, pour ne pas dire bruyammment, relayé par l'abbé Brucciani, prêtre au demeurant fort sympathique, c'est le grand retour de ce que je n'hésiterai pas à qualifier de déterminisme psycholologique. Car comment peut-on nommer autrement cette prétention à vouloir enfermer dans des catégories ou des schémas les individus par définition ineffables, bien plus riches, bien plus complexes que ces types généraux, produits d'une simplification outrancière. C'est si simple en effet de plaquer sur les individus une grille de lecture, c'est tellement satisfaisant au point de vue intellectuel. Je doute que l'homme y trouve son compte, je doute que cette connaissance fasse faire des progrès à l'humanité. Il s'agit là encore d'un carcan, système qui n'a rien à envier aux autres carcans déterministes.

Les Anciens parlaient des humeurs, faisaient intervenir les quatre éléments, tenaient compte des climats. Ainsi Hamlet, un mélancolique, déclare (je cite de mémoire): "Je ne suis fou que par vent de nord-nord-ouest". La littérature depuis le roman courtois, et combien plus au XIX e siècle, se plaît à mettre en scène des mélancoliques. Peu de place pour les flegmatiques, les bilieux ou les sanguins.

On ne peut pour tenter d'approcher l'individu, la personne humaine, se contenter de facteurs prédéterminés par une branche du savoir. L'homme est le résultat, le produit de rencontres, physiques, biologiques (l'hérédité), éducatives, sociales, (l'importance du milieu). Et l'expérience, le vécu, qu'en fait-on? Le développement des passions, sans intérêt? Que dire de cette définition du flegmatique: "qui contrôle ses émotions, impassible ( étymologiquement sans passion), imperturbable"? On me permettra encore de mettre en doute le caractère sérieux de cette théorie des tempéraments après une dernière remarque d'ordre étymologique: flegme vient du grec phlegma, humeur; le flegme désignant le caractère d'un homme calme, impassible, comment passe t-on d'un emploi général du terme à une de ses espèces? Le flegmatique ferait donc le bonheur des philosophes de l'Antiquité, un modèle d'ataraxie, d'apatheia. Heureux végétal parvenu au degré zéro d'excitation dans le Nirvana de la psychologie. Autant affirmer qu'il est difficile de connaître un individu; la psychologie, du moins la science du vivant que nous ont léguée Aristote et saint Thomas, rend compte de l'union de l'âme et du corps, étudie chacune des facultés de ce composé original, mais elle se révèle incapable - Dieu merci, elle n'a pas cette prétention - de rendre compte de l'incarnation particulière de chaque homme.

baudelairec2000 très sceptique sur cette question des 4 tempéraments.