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JUIN 2001 A JUILLET 2003

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La santé des prêtres Imprimer
Auteur : Jean KINZLER
Sujet : La santé des prêtres
Date : 2003-06-23 10:09:51

RELIGION-LE FIGARO-23/6/2003- Avec la baisse du nombre de curés
La santé oubliée des prêtres débordés
C'est, en cette fin juin, l'époque où de nouveaux prêtres sont ordonnés. Ce petit air frais ne chassera pas l'inquiétude qui plane sur l'avenir du clergé français. Son âge moyen – près de 70 ans – avance et sa santé n'est pas fameuse. C'est en effet aux alentours de la date du 29 juin (fête des apôtres Pierre et Paul) que se déroulent traditionnellement les ordinations sacerdotales dans l'Église catholique. Samedi matin 28 juin, quinze nouveaux prêtres seront ordonnés pour le diocèse de Paris ; cinq le seront le lendemain après-midi, en la primatiale Saint-Jean pour le diocèse de Lyon et, hier, Mgr Albert Rouet a présidé une seule ordination en sa cathédrale de Poitiers. Ces chiffres indiquent, en la matière, une disparité entre diocèses. Depuis un quart de siècle, l'effectif annuel des nouveaux prêtres diocésains en France est quasi stable à environ 130. Dans le même temps, quelque 700 prêtres français meurent chaque année. Le solde démographique du clergé est donc gravement négatif et impose une redistribution des forces pour se préparer à n'avoir bientôt chez nous que 8 000 prêtres, au lieu des 25 000 au début des années 90. Tout corps social, devant un tel effondrement persistant depuis cinq décennies, sombrerait dans la sinistrose. Vaille que vaille, malgré cette crise du recrutement et les salissures des histoires de pédophilie, le clergé garde le moral. Mais il néglige sa santé. Radioscopie.
Élie Maréchal
[23 juin 2003]

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Lorsqu'il était encore évêque de Moulins – donc avant son transfert à Lyon en juillet 2002 –, Mgr Philippe Barbarin avait demandé à un prêtre octogénaire de son diocèse d'arrêter de conduire sa voiture. Ce vieil homme était en effet un danger public, mais il tenait bon, circulant d'un clocher à l'autre.

Le mois dernier, Mgr Francis Deniau, évêque de Nevers (Nièvre), étendait le champ pastoral du père Roland Jouanin, curé de Guérigny et aumônier diocésain de l'Action catholique ouvrière, à quatorze autres communes, avec l'aide d'un prêtre à la retraite. Cette nomination épiscopale montre que les prêtres dans la force de l'âge sont traités comme de jeunes cadres débutants : ils sont de plus en plus chargés de travail. Quant à ceux qui ont atteint l'âge de la retraite (65 ans), ils gardent du service.


Le père Patrice B. (par discrétion, il a voulu garder l'anonymat) a 58 ans. Ordonné en 1972, il est prêtre dans une ville moyenne des Vosges. «Curé de paroisse, j'ai cinq ou six casquettes, raconte-t-il. Mon emploi du temps est très chargé, presque vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept. Outre trois semaines de vacances en été et un pèlerinage au printemps, j'arrive parfois à prendre une journée de repos ou un dimanche après-midi en famille. Mais, dès que je suis absent de mon presbytère, le stress ne me quitte pas : je peux toujours être obligé de revenir en catastrophe pour un décès ou un enterrement.» Il a effectué, l'an dernier, 55 enterrements, 18 mariages et 45 baptêmes. Il prend cependant le temps de prier et de lire.


Régulièrement, il voit son médecin et, grâce à la médecine préventive mise en place dans son diocèse, il effectue un bilan de santé tous les cinq ans. «Avec quelques problèmes de cholestérol, explique-t-il, je surveille ainsi sérieusement ma santé.» Néanmoins, peu d'occasions lui sont données de faire le point du côté de l'évêché sur son équilibre personnel. Alors, les amis veillent. Lorsque ceux-ci lui demandent : «Ça va ?», le père Patrice répond : «Ça court...» Mais il ne se plaint pas : «J'aime ce que je fais et beaucoup d'activités rendent mon travail intéressant. Si l'on veut entraîner les gens, il faut aussi mouiller sa chemise et ne pas tuer les laïcs avec trop de responsabilités. Il est parfois difficile de toucher terre. Heureusement que les prêtres de plus de 80 ans continuent et nous aident !»


Mgr Jean-Christophe Lagleize, jeune évêque de Valence, chante les louanges de son clergé qu'il vient de découvrir depuis sa nomination, l'an dernier, à 48 ans. «Les prêtres sont généreux, affirme-t-il. Mais il arrive qu'ils ne soient plus en prise directe avec une responsabilité : ils supervisent.» Ainsi les «dames catéchistes» s'accaparent leur affaire et, pendant ce temps, monsieur le curé vole de réunion en réunion : le groupe liturgique, l'équipe d'animation paroissiale, le conseil économique, la réunion de secteur, le conseil presbytéral, la démarche synodale... Et pas de RTT ! Quant au jeune ingénieur qui aurait pu «manager» dans une entreprise mais a choisi la prêtrise, il a la débilitante impression de brasser du vent.


En février dernier, le conseil presbytéral du diocèse de Nevers s'est interrogé sur «la question délicate et complexe de la santé globale – physique, psychologique, spirituelle – des prêtres». Le bulletin diocésain Église de la Nièvre, donnant le compte-rendu de cette rencontre, recommande des vacances et un jour de repos hebdomadaire : «Il faut éduquer les gens pour leur faire admettre que le prêtre a besoin de changer d'air et de se reposer. (...) Se soigner demande du temps et souvent les prêtres courent après le temps. (...) Il est conseillé de consulter un médecin qui ne fait strictement que son métier de médecin sans complaisance particulière. Certains disent que c'est le médecin franc-maçon et anticlérical qui soigne le mieux le prêtre !»


Et Mgr Francis Deniau de poursuivre par ce diagnostic : «Il est vrai que notre charité pastorale risque de se laisser défaire par la fatigue (et on est plus fatigué par ce qu'on n'arrive pas à faire que par ce qu'on fait) ; par l'absence de relève et la tentation de faire ce qu'on peut sans participer à ouvrir l'avenir ; par le cléricalisme et la jalousie qui nous empêchent de nous réjouir de ce qui se fait en dehors de nous et nous crispent sur ce que, au moins, nous maîtrisons ; par la dispersion.»


D'après des études médicales spécialisées, il n'existe aucune pathologie propre au clergé. Médecin de la Caisse d'assurance-maladie du clergé pendant dix-huit ans, le docteur Philippe Vasseur constate que «les prêtres ont les maladies des hommes de leur âge, mais elles sont souvent mal dépistées et mal suivies. Pour eux, la santé est secondaire et ils ne prennent pas le temps de s'occuper d'eux-mêmes.» Les maladies les plus fréquentes chez les prêtres de moins de cinquante ans sont la dépression, le diabète, l'hypertension artérielle ou le sida. Pour la tranche 50-70 ans, ce sont l'artériopathie, l'angor, l'infarctus, le diabète, l'hypertension sévère. Au-delà de 70 ans, le docteur Vasseur relève des polypathologies. Les maladies dans le clergé proviennent d'erreurs alimentaires graves, de l'alcoolisme ou du tabagisme, de l'insuffisance d'activités physiques.


Toutefois, les prêtres plus jeunes se montrent vigilants – voire exigeants – sur leur santé et leur équilibre, plus que leurs aînés. Quant aux évêques, eux aussi veillent mieux maintenant sur leur clergé, avec notamment un délégué de la pastorale de santé et une médecine préventive régulière. Tony Anatrella, prêtre lui-même et psychiatre, préconise une meilleure hygiène de vie dans le corps sacerdotal. «Le clergé, dit-il, est globalement fatigué, débordé, vite fragilisé et courageux avec peu de moyens. On salarie aujourd'hui des catéchistes mais les bonnes de curé ont disparu et les prêtres font eux-mêmes leur ménage et leurs courses, puis mangent mal, à la va-vite. Il faut les aider à s'organiser.»

Voilà donc des hommes qui se sacrifient à la tâche. Sont-ils «au bout du rouleau» ? Aucun interlocuteur ne l'affirme, ni évêque, ni prêtre, ni médecin. Mais le temps n'est plus de l'insouciance sur la santé d'un corps dépeint jadis comme paresseux et bon vivant.






La discussion

      La santé des prêtres, de Jean KINZLER [2003-06-23 10:09:51]
          Re : La santé des prêtres, de Appuleius [2003-06-23 12:49:27]
              Parce que, de Justin Petipeu [2003-06-23 12:59:02]
                  Re : Parce que, de Appuleius [2003-06-23 21:33:20]
                      Un livre intéressant, de Justin Petipeu [2003-06-24 11:01:29]
                          Re : Un livre intéressant, de appuleius [2003-06-28 21:45:39]