Vous avez une bien piètre opinion...
Vianney -  2011-01-04 23:45:29

Vous avez une bien piètre opinion...

...de la papauté si vous la jugez capable de vouloir imposer à une population majoritairement incroyante une sorte de “dictature de la vérité chrétienne”. J’imagine que cela fait partie des idioties qu’on enseigne dans les écoles publiques, mais ce n’est pas une raison pour leur accorder le moindre crédit. Lisez donc ce qu’écrivait un prêtre catholique sincèrement attaché aux doctrines rappelées dans le Syllabus, à une époque où la population était pourtant beaucoup plus chrétienne que de nos jours :

Mais il arrive que beaucoup de gens se trompent de bonne foi, et qu'un même pays contient diverses confessions religieuses (...) Dans cette hypothèse un Etat peut, pour le bien de la paix, tolérer les divergences de vues et de conduite, aussi longtemps qu'elles ne portent pas sur un certain code d'obligations, nécessaire celui-là, parce que de son observation dépend la vie sociale. (...) De deux maux inévitables il faut choisir le moindre, et l'on peut légitimement tolérer un mal, afin d'éviter un mal plus grand. Or, dans un pays et dans un temps donnés, quand, par exemple, ces libertés modernes, déjà inscrites dans la Constitution et les lois de ce pays, sont passées dans les faits et dans la pratique, il peut se faire que la vérité et la religion souffrent un moindre dommage à laisser subsister cet état de choses. On évite de la sorte un mal plus considérable. Vouloir, dans de telles conjonctures, abolir ces libertés déjà établies, serait, non pas servir les intérêts de l'Eglise, mais soulever contre elle des haines et des représailles, en exposant l'Etat à des troubles et à des discordes regrettables. Tel est d'ailleurs l'enseignement de la théologie. Par l'organe de saint Thomas, elle reconnaît comme légitime, en certains cas, la tolérance du culte païen lui-même. (...) La conduite de l'Eglise prouve la légitimité de cette tolérance. S'il n'était jamais permis de tolérer les libertés modernes, elle aurait dû obliger Constantin, au jour même de sa conversion, à bannir absolument de ses Etats le culte des faux dieux. Dans le cas du retour à la foi d'un prince protestant, elle devrait aussi exiger de lui l'abolition immédiate de la liberté, accordée jusqu'alors à ses sujets, de professer le protestantisme. Or, l'Eglise n'a jamais agi de la sorte, et ce n'est nullement dans ce sens que Grégoire XVI (encyclique Mirari vos, 1832), et Pie IX (enc. Quanta cura, 1864) ont condamné ces libertés.

R.P. Devivier s.j., Cours d’Apologétique chrétienne, p. 470 et suiv.