Pour ceux qui ne sauraient pas
Yves Daoudal -  2010-01-21 17:16:10

Pour ceux qui ne sauraient pas

à quoi fait allusion Leopardi: « Nous vous avertissons que cette année, l’enfant Jésus n’aura pas de cadeaux : les rois mages ne viendront pas, car ils ont été refoulés à la frontière avec les autres immigrés. » C’est ce que l’on peut lire sur un écriteau, dans la crèche de la cathédrale d’Agrigente (Sicile), à la place où devaient figurer les rois mages. L’initiative vient du directeur de la Caritas d’Agrigente, Valerio Landri. Il l’a prise « en accord avec l’archevêque Francesco Montenegro, parce que, explique-t-il, nous avons jugé qu’on devait donner un signal clair afin de faire réfléchir les gens. Si nous y pensons bien, aujourd’hui, l’enfant Jésus, s’il voulait venir chez nous, serait probablement refoulé à la frontière. Nous ne souhaitons pas créer de polémique politique, nous sommes conscient qu’une réglementation du phénomène est nécessaire mais nous sommes convaincus qu’il faut comprendre la raison pour laquelle ces gens quittent leur pays et il faut donc penser à l’accueil. » Les rois mages immigrés… Valerio Landri ajoute que parmi les habitants, il y a ceux qui « ont applaudi l’initiative, mais il y a ceux qui se plaignent en soutenant que nous avons voulu sacrifier les traditions aux problèmes de l’immigration. Nous, nous pensons que la tradition ne peut pas être placée avant les droits de l’homme. » Ces propos sont encore plus affligeants de bêtise que révélateurs de la dérive idéologique du concept de droits de l’homme. Même dans l’optique de M. Leandri et de son lamentable archevêque, l’initiative est incompréhensible, parce qu’elle est absurde. Il n’y a en effet strictement aucun rapport entre les rois mages et des immigrés, sinon le fait que les uns et les autres sont des « étrangers ». Mais les Mages ne sont pas des immigrés, ce sont des visiteurs. Ils ne fuient pas de mauvaises conditions de vie, ils sont riches. En tant que savants, ils sont respectés, en tant que rois ils sont au pouvoir dans leur pays. En faire des immigrés qui seraient aujourd’hui refoulés à la frontière, c’est imaginer que Barak Obama serait renvoyé à Washington s’il veut venir à Paris ou que le président du GIEC serait interdit de séjour à Copenhague. Leur premier geste, précisément, en tant que chefs d’Etat étrangers, est de se rendre dans la capitale pour saluer l’autorité en place : le roi Hérode. Et en tant que savants, de demander à cette autorité que les savants de ce pays les aident à résoudre une question. Puis ils vont se prosterner devant l’enfant Jésus avec le plein accord de ces autorités, dont les savants leur ont même donné l’adresse. Puis ils repartent dans leur pays, sans retourner voir le roi dont ils ont compris que c’était hélas un politicien sans scrupule. Inconsciemment, Valerio Landri sait que son propos n’a pas de sens. Car il change soudain de discours : il ne s’agit plus des rois mages, mais de l’enfant Jésus qui, dit-il, serait probablement refoulé à la frontière s’il voulait venir chez nous. Jésus l’immigré… Mais alors, c’est l’enfant Jésus qu’il faut supprimer de la crèche et remplacer par un écriteau. Evidemment, ce serait encore plus absurde, car le véritable enfant Jésus n’a rien d’un immigré, il est chez lui à Bethléem, la ville de David, son ancêtre selon le droit, et le grand roi historique de son peuple. L’idée selon laquelle l’enfant Jésus serait refoulé à la frontière s’il voulait venir chez nous est caractéristique du raisonnement immigrationniste, qui refuse de faire la différence entre des familles de réfugiés et l’immigration invasion. La Sainte Famille, qui demandait un droit d’asile provisoire, a été accueillie en Egypte, mais si des centaines de milliers de Juifs avaient voulu s’installer en Egypte, les autorités de ce pays auraient pris des mesures pour limiter le flux. Pour éviter de déséquilibrer la société dont elles ont la charge et garder son identité. Cela s’appelle la défense du bien commun, une notion fondamentale de la doctrine sociale issue de l’enseignement de Jésus. « La tradition ne peut pas être placée avant les droits de l’homme », dit M. Leandri. En réalité, les droits de l’homme invoqués à tort et à travers ne peuvent pas être placés avant la vérité. (Daoudal Hebdo N° 64)