Férule papale
Franciscus -  2007-11-28 18:44:04

Férule papale

Si vous aimez tout cela, quelques précisions. Le bâton pastoral de Benoît XVI, visible sur la photo et très célèbre, s'appelle très exactement la férule papale. C'est le symbole de son pouvoir spirituel et temporel. Jusqu'au XVIe siècle, le pape la recevait lors du "possesso" : prise de possession de son siège au Latran. En métal précieux, cette férule se distinguait de la crosse des autres évêques par la croix grecque qui la surmontait à la place du crosseron en volute. Le pape l'employait pour les messes solennelles (entrée et bénédiction). Cet usage s'est ensuite perdu. Après Pie XII, le vestiaire liturgique et les attributs spécifiques au pontife romain et à son cortège ont été simplifiés par des suppressions (falda sous Jean XXIII, tiare, fanon dais et flabelli sous Paul VI, puis sedia sous Jean-Paul II). Paul VI est cependant revenu à l'usage traditionnel de la férule crucifère. Elle fut commandée au sculpteur Lucas Scorzelli qui, s'informant auprès de spécialistes, représenta avec réalisme l'aspect du corps du crucifié sur la croix. Tous les successeurs de Paul VI ont repris cet usage : un petit écusson sur la hampe est frappé à leurs armes. Le pape en fait usage comme les évêques le font de leur crosse. C'est même devenu le seul signe distinctif du pape par rapport aux autres évêques. Les légats peuvent aussi la recevoir puisqu'ils représentent le pape : ainsi pour le cardinal Gantin au congrès eucharistique de Lourdes en 81 puisque Jean-Paul II était convalescent. Pour la petite histoire, à la fin de la messe de son intronisation, Jean-Paul II a pris la férule des deux mains pour la hisser vers les fidèles. La spécificité de cette forme est bien connue. Cependant le cardinal Lustiger avait lui aussi une haute crosse crucifère en bois, cette matière étant réservée autrefois aux abbés ou abbesses cisterciens crossés, en signe d'humilité. Il avait donc un bâton pastoral de la matière la plus humble mais d'une forme réservée au pape! Précisons enfin qu'en 1983, pour l'Année Sainte de la Rédemption (photos certainement sur le site de l'O.R.), Jean-Paul II a employé la grande croix papale à triple croisillon de Léon XIII mais ce n'est pas un équivalent de la férule : il s'agit d'une croix processionnelle que le pontife prend alors en main pour franchir le premier la Porte Sainte. Pour le Jubilé de l'an 2000, tout cela a été modifié par Mgr Marini (l'ancien)qui l'explique dans son récent livre. Plus de marteau, mantum violet, pour un résultat assez déconcertant.Mais c'est une autre histoire. Depuis le début du pontificat de Benoît XVI, le pallium à l'antique est redevenu un élément distinctif des ornements du pape (puisqu'il impose aux archevêques des palliums de forme tridentine). En résumé, il n'y a aucune raison historique pour que Benoît XVI prenne une crosse, même d'or car jamais les papes n'en ont pris. Le seul moyen pour satisfaire ceux qui trouvent que l'actuelle férule s'accorde mal avec les ornements plus somptueux observés au consistoire serait qu'ils lui en offrent une dorée. Il ne me semble pas, en effet, que les trésors de la basilique ou de la sacristie pontificale en possèdent une, sauf erreur. Cordialement, F.