Cher Luc Perrin

Vous savez je partage pour beaucoup de choses votre vision des choses. Je n'aime pas la traduction du Notre Père, je déteste les abus liturgiques qui, en effet, affadissent la foi, j'aime la belle liturgie et je considère que la forme a toute son importance. Cependant si vous relisez bien mon intervention, vous verrez que je n'ai pas dit que la forme n'avait pas d'importance. J'ai simplement dit qu'à un moment où à un autre, il est absolument nécessaire d'oublier la forme, de s'attacher au fond, puis de revenir à la forme. C'est un processus que beaucoup de "tradis" (je n'aime pas cette étiquette) sont incapables de faire. En général beaucoup n'ont jamais mis les pieds à une messe Paul VI et critiquent à qui mieux mieux. Ou alors, les rares fois où ils y sont allés ils sont tombés sur une messe "créative"....

Comme vous l'avez compris, j'ai toujours fréquenté les milieux paroissiaux, depuis toujours, avec un pause chez la FSSPX. Quand je suis retourné à la messe en paroisse, j'avais dans la tête tout le bourrage de crâne qu'on y avait opéré. J'ai dû m'en défaire. Je ne pouvais pas m'empêcher de tempester intérieurement, de critiquer, juger, etc... C'est un attitude indigne d'un chrétien, dont je me suis en partie défait. Petit à petit je me suis attaché au fond, rien qu'au fond : le Christ présent sur l'autel, la communion, la ferveur de l'assemblée. Puis je suis revenu vers la forme en étant intransigeant : une messe Paul VI célébrée selon les rubriques me convient tout à fait. Donc je ne pense pas être dans le mirage du "tout nouveau tout beau", puisque ce nouveau dure depuis que je suis né !

OK pour les abus liturgiques. On est tous d'accord... Moi je conteste que l'affadissement de la foi soit dû au nouvel Ordo. En France dans les années 50, ça commençait déjà à partir en sucette, bien avant le concile et le missel de 1969. La réforme liturgique a sans aucun doute accéléré le processus, mais elle ne l'a pas pas initié. Je pense simplement que les cathos de 2010 ont une foi plus accrochée et plus réelle que la moitié des français qui allaient à la messe en 40... Il est inconcevable de penser que le nouvel ordo soit à l'origine de la désaffection des églises par 50% des Français ! Cette crise grave montre surtout que beaucoup de coins de France n'ont jamais été vraiment évangélisés (au sens fort du terme). Beaucoup de Français étaient catholiques de tradition depuis des siècles, mais ça ne tenait pas à grand chose, alors ça n'a pas tenu face à la montée du matérialisme. Des régions comme la Champagne, le Berry, la Bourgogne, et d'une manière générale toutes les provinces françaises qui faisaient partie de l'apanage royal depuis toujours n'ont jamais vraiment été imprégnées en profondeur de l'Évangile. L'ouest a été évangélisé tardivement par Saint Louis-Marie Grignon de Montfort, la Lorraine a bien résisté face à la crise, ainsi que l'Alsace, le pays basque, les régions reculées du Massif central ou encore la Corse. La région d'Europe la plus évangélisée est pour moi la région des Marches en Italie, autour d'Ancône et de Lorette. La ferveur y est impressionnante, c'est une des rares régions d'Italie où le taux de criminalité a avoisiné pendant des siècles. La présence forte de Marie à Lorette n'y est pas pour rien ! Là-bas la crise de l'Eglise n'existe quasiment pas... Dans certaines régions de France, la messe est parfois abominable, mais le taux de pratique n'a pas énormément baissé : l'Alsace par exemple (n'êtes-vous alsacien vous-même d'ailleurs ?). Cela ne vous interpelle-t-il pas ?


Je pense que le clivage n'a plus lieu d'être, ou alors que c'est une histoire de "vieux" ayant connu les abus liturgiques. De plus en plus de jeunes de ma génération refusent le clivage et sont bi-ritualistes. Les querelles de clocher ne les intéressent plus car ils considèrent qu'elles affaiblissent l'Église. L'unité se fera en faisant table rase de ces clivages. Après tout entre ED et le reste de l'Église, y a-t-il tellement de différences ? Je ne crois pas : nous professons la même foi, nous avons la même confiance dans le magistère de l'Église, nous communions au même corps, nous recevons les mêmes sacrements.

Suite au prochain épisode, merci d'avoir pris le temps de lire mon verbiage !