'Jacques Maritain expose fort bien et brièvement dans Humanisme intégral à la fois la distinction du spirituel et du temporel'.
Sur Maritain et Humanisme intégral, on peut lire l'oeuvre de Philip Jenkins, The Catholic Church and the Counter-Faith (lien ci-dessous); oeuvre de vulgarisation mais bien écrit et bien fondé. J’essaie actuellement d’écrire sur la pensée de Maritain sur le spirituel et le temporel; le produit du travail, si je l’achève, sera en Anglais, mais l’essentiel est que la distinction du spirituel et du temporel selon Maritain soutient que l’ordre temporel possède un fin autonome – une position condamné non seulement par Léon XII et S. Pie X, mais aussi par Jean XXIII dans Pacem in Terris:
“47 - Pour autant l'autorité n'échappe point à toute loi. Elle consiste précisément dans le pouvoir de commander selon la droite raison. Dés lors toute sa force impérative lui vient de l'ordre moral, lequel à son tour repose sur Dieu, son principe et sa fin. « L'ordre absolu des vivants et la fin même de l'homme - de l’homme libre, sujet de devoirs et de droits inviolables, de l'homme origine et fin de la société - regardent aussi la cité comme communauté nécessaire et dotée de l’autorité ; sans celle-ci pas d'existence, pas de vie pour le groupe... Suivant la droite raison et surtout la foi chrétienne, cet ordre universel trouve nécessairement son origine en Dieu, être personnel et notre Créateur à tous ; par conséquent les titres des pouvoirs publics se ramènent à une certaine participation de l'autorité divine elle. même (31).
48 - Aussi bien, si le pouvoir s'appuie exclusivement ou principalement sur la menace et la crainte des sanctions pénales ou sur la promesse des récompenses, son action ne réussit aucunement à susciter la recherche du bien commun ; y parviendrait-il, ce serait d'une façon étrangère à la dignité de l'homme, être libre et raisonnable. L'autorité est avant tout une force morale. Ses détenteurs doivent donc faire appel, en premier lieu à la conscience, au devoir qui incombe à tous de servir avec empressement les intérêts communs. Mais les hommes sont tous égaux en dignité naturelle ; aucun n'a le pouvoir de déterminer chez un autre le consentement intime ; ce pouvoir est réservé à Dieu, le seul qui scrute et qui juge les décisions secrètes de chacun.
49 - Par suite, l'autorité humaine ne peut lier les consciences que dans la mesure où elle se relie à l'autorité de Dieu et en constitue une participation (32). »
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57 - Ici Nous devons attirer l'attention sur le fait que le bien commun concerne l'homme tout entier, avec ses besoins tant spirituels que matériels. Conçu de la sorte, le bien commun réclame des gouvernements une politique appropriée, respectueuse de la hiérarchie des valeurs, ménageant en juste proportion au corps et à l'âme les ressources qui leur conviennent (42).
58 - Ces principes sont en parfaite harmonie avec ce que Nous avons exposé dans Notre encyclique Mater et Magistra : « le bien commun embrasse l’ensemble des conditions de vie en société qui permettent à l'homme d'atteindre sa perfection propre de façon plus complète et plus aisée (43). »
59 - Composé d'un corps et d'une âme immortelle, l'homme ne peut, au cours de cette existence mortelle, satisfaire à toutes les requêtes de sa nature ni atteindre le bonheur parfait. Aussi les moyens mis en œuvre au profit du bien commun ne peuvent-ils faire obstacle au salut éternel des hommes, mais encore doivent-ils y aider positivement (44).”
L’ironie du débat se trouve dans le fait que Maritain a emprunté la distinction entre fin temporel et fin surnaturel utilisé par le p. Pedro Descoqs S.J. pour soutenir que les catholiques pourrait légitimement s’aller avec l’athée Maurras: qu’on voit l’influence d’Henri de Lubac S.J, ennemi de Descoqs, dans l’enseignement de Pacem et Terris; et que l’enseignement de cette encyclique enlève toute justification théologique pour la position sur les relations entre spiritual et temporel de Maritain dans Humanism intégrale; que Paul VI a suivi Maritain sur ce sujet, en contradiction flagrante avec les idées de de Lubac sur la grace tels qu’on les trouve dans Pacem et Terris. La detestation des tradis pour de Lubac, il me semble, les ont rendus aveugles à cette ironie, qui pourtant les fournit avec un argument solide contre la liberté réligieuse telle que Maritain l'a concu.
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