Merci au FC d'avoir mis à disposition ce texte en tout point remarquable. Les "liseurs" m'accorderont que je ne flatte pas d'office tout membre de la Hiérarchie, Curie comprise.
Ce n'est pas la première fois que le Cardinal-préfet de la Congrégation pour le Culte divin montre une claire compréhension des problèmes qui frappent la mise en oeuvre de la liturgie dans les communautés de par le monde. A cet égard, il poursuit en l'accentuant l'oeuvre de son prédécesseur, le cardinal Medina Estevez.
Je m'interroge dès lors d'autant plus sur l'hostilité connue de Son Eminence envers une extension de l'usage du VOM. Comme on parle du "mystère Jean XXIII", il y a un "mystère Arinze" sur ce point.
D'autant que sous le pontificat de Jean-Paul II, le Cardinal avait opté pour une prudente réserve, renvoyant les solliciteurs à son confrère, le Cardinal-président de la Commission Ecclesia Dei.
Puis brusquement, après l'élection de Benoît XVI, le cardinal Arinze a changé de position, s'alignant sur l'establishment marino-bugniniste contre toute attente et toute logique. On sait qu'avec son ancien n°2, il a couvert un mémoire s'opposant à une modification du régime canonique restrictif de 1984-88 pendant l'été 2005 : épisode qui n'est, peut-être, pas sans rapport avec la "promotion" rapide de Mgr Sorrentino dans un diocèse hors de Rome.
Plus surprenant encore, le Cardinal en plein milieu du Synode de 2005 a donné un avis négatif public lors d'une conférence de presse, alors qu'une à deux semaines plus tard, le cardinal Castrillon Hoyos intervenait en sens opposé devant les Pères synodaux. Pourquoi cette opposition frontale subite alors que les positions de Joseph Ratzinger sont bien évidemment connues du Cardinal nigérian.
Depuis les réunions de chefs de dicastères puis du Consistoire où il semble avoir maintenu son hostilité, selon les indiscrétions usuelles, il ne s'est pas prononcé à nouveau en public contre le VOM.
Son discours à l'ISL, à Paris récemment, prit même à contre-pied complet le concert de louanges (très incongru) chanté a capella par quelques ténors de l'épiscopat français : quand il s'agit de fustiger les abus, dérives, abominations trop répandues dans l'univers NOM, le cardinal Arinze n'a pas varié d'un iota. Et il manie le fouet, verbal, avec la vigueur de Notre Seigneur à l'égard des marchands du Temple.
Le discours de Gateway, Missouri, lui ressemble beaucoup.
Au fond, le Cardinal est proche des thèses de Denis Crouan.
Mais je persiste à penser qu'il y a là une incohérence foncière. Loin de s'opposer à elle, l'extension de la pratique du VOM conditionne la révision profonde, qui peut être graduelle dans son déroulement, que nécessite l'actuel NOM.
Multiplier les mises en garde verbales, type Ecclesia de Eucharistia et Redemptionis sacramentum, dans un contexte où règne l'establishment marino-bugninien à tous les étages de la Congréation du Cardinal jusqu'au plus modeste service diocésain de "pastorale" liturgique, en passant par les diverses institutions de (dé)"formation", les puissants centres d'édition de livres et documents à usage liturgique, relève du voeu pieux. En 1974, pour tenter de sauvegarder un minimum de Sacrosanctum concilium, Paul VI a écarté Annibale et fait publier un vademecum minimal de chants grégoriens à savoir. En pure perte comme chacun sait.
Le double objectif, d'une large extension du VOM pour restaurer la doctrine liturgique dans le Peuple de Dieu et d'une marche raisonnable vers un retour à la réforme organique voulue par les Pères de Vatican II (je ne dis pas le clan bugninien et ses affidés) pour le NOM, devrait rassembler et non diviser celles et ceux dans l'Église qui ont gardé vivante la saine doctrine de la Liturgie catholique, dans tous ses rits. Éminence, si un simple baptisé peut risquer un avis, n'ayez pas peur : oubliez les haines recuites des "intégristes Paul VI" et ouvrez vos bras paternels à tous les ouvriers qui veulent travailler dans la Vigne liturgique. Dîtes comme feu le cardinal Marty : "j'embauche !". Les tradis ont un puissant désherbant écologique : la mauvaise herbe néo-liturgique ne résiste pas longtemps à une exposition prolongée à la Sainte Messe traditionnelle.

L Perrin