Si ......
Si tu peux voir détruit l'ouvrage de ta vie Et sans dire un seul mot te mettre à rebâtir Ou perdre en un seul coup le gain de cent parties Sans un geste et sans un soupir
Si tu peux être amant sans être fou d'Amour Si tu peux être fort sans cesser d'être tendre Et, te sentant haï sans haïr à ton tour Pourtant lutter et te défendre
Si tu peux supporter d'entendre tes paroles Travesties par des gueux pour exciter des sots Et d'entendre mentir sur toi leurs bouches folles Sans mentir toi même d'un mot
Si tu peux rester digne en étant populaire Si tu peux rester peuple en conseillant les rois Et si tu peux aimer tous tes amis en frères Sans qu'aucun d'un soit tout pour toi
Si tu sais méditer, observer et connaître Sans jamais devenir sceptique ou destructeur Rêver, mais sans laisser ton rêve être ton maître Penser, mais sans n'être qu'un penseur
Si tu peux être dur sans jamais être en rage Si tu peux être brave et jamais imprudent Si tu sais être bon, si tu sais être sage Sans être moral ni pédant
Si tu peux rencontrer triomphe après défaite Et recevoir ces deux menteurs d'un même front Si tu peux conserver ton courage et ta tête Quand tous les autres les perdront
Alors les Rois, les Dieux, la Chance et la Victoire Seront à tout jamais tes esclaves soumis Et ce qui vaut bien mieux que les Rois et la Gloire Tu seras un homme, mon fils
Rudyard KIPPLING
Que j'ai fait apprendre par coeur à mes enfants.
Mais avouez que c'est toute une sagesse stoïcienne...Différente de celle de "La mort du Loup" de Vigny dans " Les destinées " et beaucoup plus positive et stimulante.
"Seul le silence est grand; tout le reste est faiblesse. - Ah ! je t'ai bien compris, sauvage voyageur, Et ton dernier regard m'est allé jusqu'au coeur! Il disait : " Si tu peux, fais que ton âme arrive, A force de rester studieuse et pensive, Jusqu'à ce haut degré de stoïque fierté Où, naissant dans les bois, j'ai tout d'abord monté. Gémir, pleurer, prier est également lâche. Fais énergiquement ta longue et lourde tâche Dans la voie où le Sort a voulu t'appeler, Puis après, comme moi, souffre et meurs sans parler. "
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